Mouvement Socialiste Monarchiste

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Mouvement Socialiste Monarchiste

État synthétisé du royalisme à la Libération

A la Libération, le mouvement monarchiste dans son ensemble est complètement désorganisé. Le chantre de la restauration, Charles Maurras, a été emprisonné, le quotidien l'Action française interdit et on accuse ouvertement les royalistes d’avoir trempé dans la collaboration ou d’avoir soutenu le régime du Maréchal Pétain. Il se trouve même des résistants qui n’hésiteront pas à brûler quelques châteaux dans les campagnes. Le comte de Paris, Henri d’Orléans, est toujours en exil malgré une tentative ratée de prise de pouvoir à Alger en 1942 (Le royalisme en Algérie française). Le mouvement royaliste semble alors en déliquescence.

Les origines du Mouvement Socialiste Monarchiste

Jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’Action française occupait le pavé des rues et était devenu le principal mouvement monarchiste de l’entre-deux-guerres. Son école de pensée avait même dépassée les frontières de l’hexagone et ses théories serviront un Franco, un Salazar ou un Mussolini... Mais avec l’entrée des Allemands en France et la « divine surprise » que représentait le Maréchal Pétain pour Maurras, les royalistes s’étaient considérablement divisés. Il y a ceux qui rejoignirent Vichy, d’autres la résistance gaulliste. Tous avaient cependant en commun le même amour de la patrie. En 1945, la France est à reconstruire et sur les ruines fumantes de l’Action Française, il y a des monarchistes qui vont tenter de proposer une autre alternative à cette droite royaliste.

Le “Mouvement Socialiste Monarchiste (M.S.M.)” de Jean Marc Bourquin apparaît sur la scène politique de la France d’après guerre. Cet ancien Avoué, frère d'un éditeur genevois et adjoint du Maire à la mairie de Compiègne se réclame de René de la Tour du Pin, auteur du célèbre livre Vers un ordre social chrétien. Le M.S.M. élabore un véritable programme social monarchiste et entend faire du Maurras sans Maurras mais sa doctrine reste assez confuse. Tout au plus s’accorde t-on sur le fait qu’il prône la restauration de la monarchie sur le style des pays nordiques. Le 7 février 1945, devant un millier de personnes il annonce la création de son mouvement et s'entoure d'un organe exécutif. Le 1er mars 1945, la Réveil des jeunes s'en fera ironiquement l'écho tandis que L'Action journal communiste dénonçait le mouvement, appelant le gouvernement à le faire interdire.

Ce n’est pas la première fois que des monarchistes tentent de séduire un milieu populaire qu’il leur était assez défavorable dans sa majorité. En effet, déjà en 1882 la “Ligue Populaire Monarchiste” se prononçait largement en faveur du corps ouvrier et paysan, fer de lance de la nation. Le 9 mars 1883, elle organisa avec un grand retentissement une manifestation en faveur des chiffonniers au chômage suite à une obligation des propriétaires de faire usage de la poubelle. Elle recueillit des milliers d’adhérents avant de disparaître en septembre 1885. On a depuis oublié qu’en 1874 ce fut un député monarchiste qui fut à l’origine d’une loi réglementant le travail des femmes et des enfants en usine ou en 1884 un Albert de Mun qui luttait pour que la responsabilité collective de la profession soit reconnue en cas d'accident du travail pour les ouvriers. Une loi que la République adoptera finalement 10 ans plus tard. En 1888, ce très catholique député de Pontivy propose que l’on interdise le travail aux femmes accouchées pendant quatre semaines. Le Centre Gauche et les mouvements de Gauche s’y opposeront. Cette loi ne sera votée qu’en 1913

Même le Comte de Chambord, Henri V, en 1865 en publiant sa Lettre sur les ouvriers. Fort de cet exemple, le “Mouvement Socialiste Monarchiste” ne peut que suivre un chemin tout tracé.

Une aventure de 18 mois

Numéro du Lys rouge


L’aventure va durer à peine 18 mois (décembre 1944-juillet 1946). Le gouvernement de la République Provisoire incarné par le Général De Gaulle est déjà affairé à la reconquête politique du pays en vue des prochaines élections municipales prévues fin avril 1945. Le Parti Communiste également. Les idées sociales ont le vent en poupe dans un pays traumatisé par cinq ans de guerre et d’occupation. Le Mouvement Socialiste Monarchiste se veut une alternative entre la droite et la gauche communiste. Le socialisme au service de l’État et du Roi. Le M.S.M. édite clandestinement et bimensuellement un petit journal nommé le Lys rouge. Mais avec la censure gouvernementale et diverses saisies, le journal devra changer plusieurs fois de noms au cours de sa brève existence (L’avant-garde Royaliste, l’Action Royaliste, Voie royale, Nouvelles Monarchistes...). Quoiqu’il en soit, le M.S.M. se trouve un électorat sans pour autant dépasser le cadre de la capitale Paris ou quelques grandes villes de province. Néanmoins, ses réunions attirent. On verra même des ouvriers de Renault distribuer ouvertement des feuilles du Lys Rouge dans l’usine. Il faut dire que la nationalisation des usines Renault en janvier 1945 avait fortement marqué les esprits.

Et le comte de Paris  ? Il n’apprécie pas l’initiative de ce mouvement qui marche sur ses plates-bandes. Le comte de Paris avait révélé en 1937 dans son ouvrage Le Prolétariat son idée des classes sociales ce qui lui vaudra le sobriquet de « prince rouge ». L’Action Française 2000 écrivait à ce sujet qu’Henri d’Orléans « conjuguait simplement la doctrine sociale synthétisée par la Tour du Pin avec une analyse pertinente de l’actualité socio-économique de l’immédiat avant guerre » (n°2701 du 18 au 31 mai 2006, Pierre Lafarge).

L’Action française affaiblie (depuis sa cellule de prison Maurras continue à écrire mais il est peu lu), le comte de Paris entend bien fédérer tous les mouvements et autres partis sous sa férule. N’écrit-il pas : « je sentais que quelque chose d’important et de nouveau palpitait en France et j’étais avide de la saisir (…) j’inclinais en faveur d’un centre étayé par les socialistes et les radicaux (...)» (Mémoire d’exil et de combats). Et même si il reconnaît le prétendant, le M.S.M. refuse catégoriquement de lui faire allégeance. Et les Maurrassiens accordent peu de crédits aux idées de Jean Marc Bourquin qui ne rejette pas le système parlementaire.

Tract du MSM

Le M.S.M. va participer aux élections législatives du 21 octobre 1945 et ce malgré l’agacement d’Henri d’Orléans, comte de Paris. Deux listes seront présentées dans le 1er et 2ème secteur de Paris. Le Mouvement Socialiste Monarchiste, (allié à des mouvements hétéroclites royalistes comme l'Action Royaliste Catholique, les Jeunesses Royalistes ou le Mouvement Traditionaliste Monarchique) obtient respectivement 5627 voix (Liste Monarchiste de Réconciliation des Français conduite par Jean-José Almira) et 7152 voix (Liste d'Union Monarchique conduite par Jean-Marc Bourquin lui même). Mais si cela reste un échec en demi-teinte, il n’en demeure pas moins que le mouvement montre que l’idéal monarchique reste encore vivace, du moins à Paris, et qu’il touche une certaine forme de classe populaire.

Disparition du Mouvement Social Monarchiste

Il ne reste pourtant que quelques mois au M.S.M. à vivre. Il n’arrive pas à exploiter ses résultats si ce n’est attirer encore d’autres groupuscules monarchistes comme les providentialistes de l’Étendard. Durant l’Eté 1946, il accepte de se fondre dans les Comités Monarchistes que vient de créer le comte de Paris. Et ce sera un échec comme également pour le comte de Paris. Certains anciens membres du M.S.M. iront créer de leur côté un Bureau d’Action socialiste monarchiste (dirigé par Pierre Schaeffer) sans pour autant se délier du Comité Central Monarchiste cher au prétendant au trône, d’autres un Centre d’études socialistes Monarchistes (qui éditera Jours Nouveaux avant que ses principaux animateurs ne rejoignent la SFIO).

La publication du Lys Rouge cesse dans le courant de 1946-1947. Cohabitant au côté du Lys Rouge, la Force Populaire de Roger Nimier (1925-1967) aura une existence éphémère de septembre à novembre 1947.

Jean Marc Bourquin va se rapprocher de l’AF avant de collaborer à la Nation Française de Pierre Boutang de 1955 à 1967, puis cesser toutes fonctions au sein du mouvement royaliste. Il aura tenté de créer en mars 1958 un éphémère Rassemblement monarchiste français qui proposait de remettre le pouvoir provisoirement au Général de Gaulle.

Oublié de tous, Jean Marc Bourquin meurt le 17 mai 1979.

Le M.S.M. n’est pas resté ancré dans la mémoire des monarchistes. François Broche, auteur du Comte de Paris, l’ultime prétendant, éditions Perrin qualifie simplement le M.S.M. « d’organisation fantomatique ». Il résume peut être réellement ce que fut cette brève expérience socialisante chez les monarchistes. Des Monarchistes de gauche que fustigea un certain Karl Marx dans son Manifeste du Parti Communiste et qu’il présentait comme un vulgaire socialisme feudal.

Pourtant l’avènement de la Nouvelle Action Française allait démontrer quelques années plus tard que les idées socialistes pouvaient se conjuguer encore au présent avec l’idée de la monarchie. Le M.S.M. faisait alors figure de précurseur en la matière dans l’histoire politique des royalistes.

Le Lys rouge aura lui encore deux autres vies. Il refait surface dans les années soixante-dix, publié par des dissidents de l’Action française sous la forme d’un bulletin d’une dizaine de pages qui cesse de paraitre en 1971. Et enfin, en 1976, il devient un des organes de la Nouvelle action royaliste dont l’édito n°1 affirme immédiatement sa ligne politique : « construire un mouvement royaliste populaire pour une monarchie populaire ».

Quelques membres

Jean Marc Bourquin, président - Albert Salmon-Malebranche, vice-président - Désiré Barnoin, secrétaire général - Raymond des Essards, délégué à la propagande - Gilbert Robineau - Emile de Taxis - Mme Louis Rousseau - Léon de Forges de Parny - Jacques Danos - René Lambert - Jean Moussoir - Robert Linand de Bellefonds - Roger Nimier - Christian Perroux - Jacques Porre - Léon Bergon - Michel Surre-Calvet - Suzanne Loetscher.

Références

  • René de la Tour du Pin, Vers un ordre social chrétien, Nouvelle Librairie Nationale, 1907 (à lire en ligne)
  • Henri comte de Chambord, Lettre sur les ouvriers, 1865 (à lire en ligne)
  • Henri comte Paris, le Prolétariat, Les Œuvres Françaises, 1937.
  • Henri comte Paris, Mémoires d’exil et de combats, Atelier Marcel Jullian, 1979.:;

Bibliographie

  • Henry Coston, Partis, journaux et hommes politiques, Lectures françaises, numéro spécial, 1960, 622 p. (cité en page 541).
  • Henry Coston, Dictionnaire de la politique française, tome 1, La Librairie française, 1967 (cité en page 736).
  • Patrick Louis, Histoire des Royalistes, de la Libération à nos jours, Jacques Grancher Éditeur, 1994.
  • Philippe Vilgier, Le Lys rouge et les royalistes à la Libération, Éditions du Camelot et de la Joyeuse Garde, 1994.
  • Jérôme Cotillon, Ce qu'il reste de Vichy, Armand Colin, 2003 (brève allusion au mouvement à la page 117).

Liens externes